La question des devoirs à la maison : dilemme professionnel ? - Circonscription Dieppe Est

La question des devoirs à la maison : dilemme professionnel ?

, par Odile Fleury

Dernièrement, sur les réseaux sociaux, la question des devoirs à la maison en élémentaire a de nouveau été mise au centre des préoccupations.
La réflexion portant sur ce sujet devrait s’étendre à celle du travail personnel. En effet le travail personnel de l’élève est souvent réduit au travail à la maison, autrement dit aux devoirs.

Il apparaît que les fonctions essentielles du travail personnel diffèrent selon les personnes et les moments. Il s’agit de :
  fixer les apprentissages ;
  viser l’autonomie des élèves ;
  communiquer avec les familles.
Or, les recherches ont démontré que le travail demandé via les devoirs à la maison ne favorise pas tant l’approfondissement des connaissances et des savoirs mais renforce surtout les malentendus scolaires et les inégalités.

Dans la loi de 1956, qui précise l’interdiction de donner des devoirs écrit, aucune distinction n’est proposée quant au type de travail proposé à réaliser à la maison.
Concrètement quels types d’activités proposer en devoir à la maison permettraient de remplir les trois fonctions essentielles citées précédemment sans renforcer les inégalités et les malentendus scolaires ?

Ce que précisent les programmes quant au travail personnel :
 Pour le cycle 2 :
« Au CE1 et au CE2, les révisions nécessaires à la maitrise du code et les entrainements pour parvenir à une réelle automatisation de l’identification des mots sont mises en place autant que de besoin, toujours en relation avec l’écriture de mots. »
 Pour le cycle 3 :
« En gagnant en aisance et en assurance dans leur utilisation des langages et en devenant capables de réfléchir aux méthodes pour apprendre et réaliser les tâches qui leur sont demandées, les élèves acquièrent une autonomie qui leur permet de devenir acteurs de leurs apprentissages et de mieux organiser leur travail personnel. »

Quels types de devoirs donner ?
Pour nourrir la réflexion, on peut lire les 7 familles d’aide pour décliner l’aide personnalisée de Roland Goigoux. Il s’agit non seulement des étayages comme réponses adaptées aux besoins des élèves, mais aussi des méthodes pour apprendre aux élèves à faire seuls.
Les 5 premières familles peuvent constituer un appui pour définir le type de devoir à donner.
  exercer/s’exercer : lire oralement, réviser des tables de multiplication, automatiser des procédures de calculs ;
  réviser : préparer une évaluation tout en sachant ce qu’il y aura dans l’évaluation (évaluation positive) ;
  soutenir : expliquer à ses parents un exercice réalisé en classe : qu’est-ce que je dois faire, comment je m’y suis pris, quels outils j’ai utilisé ;
  préparer : anticiper l’activité qui sera donnée le lendemain : préparer une lecture en travaillant en amont l’identification de certains mots que l’élève s’entraîne à lire ou en apprenant du lexique avant une lecture ;
  revenir en arrière : retravailler des notions déjà vues mais non sollicitées dernièrement ;
  compenser ;
  faire autrement.

Autrement dit, il s’agit de proposer aux élèves des activités qui leur font sens parce qu’ils ont déjà abordé la notion en classe. C’est l’occasion de proposer une activité permettant de réinvestir une notion. Tout ce qui est proposé à la maison doit être réalisable et dans un temps relativement court. N’oublions pas qu’un élève qui a effectué sa journée de classe a rempli son contrat.

Pour approfondir cette réflexion :
 Un article :
La recherche québécoise de Roch Chouinard, Jean Archambault et Andréane Rheault relative aux écrits scientifiques portant sur les devoirs (2006) « Les devoirs, corvée inutile ou élément essentiel de la réussite scolaire ? »
Cette recherche remet en cause 5 idées reçues, à savoir :
  les meilleurs enseignants sont ceux qui donnent des devoirs régulièrement ;
  il est préférable de donner plus de devoir ;
  tous les parents s’attendent à ce que les enseignants donnent des devoirs à leurs enfants ;
  les devoirs contribuent à consolider les apprentissages réalisés en classe ;
  les devoirs favorisent le développement de l’autonomie.

Puis, elle présente les quatre conditions nécessaires pour que le devoir personnel remplisse les 3 fonctions définies ci-dessus.
http://www.erudit.org/revue/rse/2006/v32/n2/014410ar.html

 Un dossier de l’IFE (Institut Français de l’Education) :
Dossier n° 111 de Juin 2016 « Représentations et enjeux du travail personnel de l’élève »
Ce dossier montre que le travail personnel des élèves non seulement ne peut pas se réduire aux devoirs à la maison, mais que c’est le moment le moins propice au travail personnel, et donc aux apprentissages.
Après un rapide rappel historique, il est constaté que le travail personnel est trop souvent réduit aux devoirs. Le dossier revient sur cette pratique bien ancrée que sont les devoirs à la maison. Il aborde ensuite le lien entre devoirs scolaires et réussite scolaire. Il interroge enfin l’espace familial en termes de facteurs de risque ou de réussite.
Les deux autres parties du dossier s’attachent au travail personnel de l’élève en classe et posent la question de moyens dévolus pour susciter l’engagement et la persévérance.
http://ife.ens-lyon.fr/vst/DA/detailsDossier.php?parent=accueil&dossier=111&lang=fr

 Lire à la maison d’après l’étude de Nagy et Herman (2001) :
http://ekladata.com/Rq6BfKad25fHRyv76dtVGmn5T1A.png